S'inscrire dans son temps
J'aime dire que mon travail s'inscrit dans son époque et pourtant s'en affranchit également. Je suis avant tout photographe, mais aussi artiste numérique.
Le 21e siècle a vu l'explosion de l'image et de sa diffusion au travers d'internet. Mes œuvres sont destinées avant tout à une présentation réelle et s’accommodent assez mal d'une présentation sur le Web. Elles ne sont pas destinées à être diffusées à l'infini au travers des médias numériques, mais plutôt à être des objets uniques et matériels exposés sur un mur.
Ma lumière et mes portraits s'inspirent beaucoup de la peinture classique. Mes paysages sont dessinés par cette lumière. Ma démarche créative s'inspire également des modernes du 20e siècle par sa dimension abstraite même si elle s'exprime à l'échelle du détail.
Et pourtant c'est bien la technologie digitale actuelle qui a permis la naissance et la création de mes œuvres et rien de ce que je fais ne pourrait exister sans la puissance des outils de la toute dernière génération numérique.
De l'importance de la lumière et de la photographie
Chaque photo, même multipliée à l'infini, est unique lors de sa création. C'est cet « instant photographique » qui est à l'origine de chacune de mes œuvres et la lumière de ce moment qui leur donne vie.
Cet instant est pour moi d'une importance capitale et l'observateur final doit ressentir ce même frisson que ressent le photographe à l'instant d'appuyer sur le déclencheur en pensant qu'il a réussi à saisir l'insaisissable.
La lumière est la base de la peinture photographique, c'est elle qui décide ou non de l'émotion. Même si aujourd'hui tout peut être recréé en post production et que l'on peut redessiner une photo de A-Z pour en faire presque une illustration très éloignée de l'ambiance d'origine, cela n'est pas mon but. Seules les photos qui ont une « âme lumineuse » seront sélectionnées pour y appliquer la suite du travail créatif que je destine à mes œuvres. Et même si le résultat final ne semble pas éloigné de l'image d'origine, il en conservera malgré tout l'âme et la lumière.
De la « retouche » dans mon travail
Paradoxalement je ne retouche que très rarement les images. C'est à dire que j'en modifie assez peu les détails et l'ambiance lumineuse, c'est le ressenti de la réalité au moment de la photo qui guide mon travail.
Mais je procède à une vraie réinterprétation des couleurs ou de la matière de l'image, alors que je ne modifie que rarement, au sens retouche, des portions de l'image qui ne me conviendraient pas ou des ambiances lumineuse qui n’existaient pas au moment de la prise de vue. En ce sens, malgré le travail important qui est réalisé dans les fait sur chaque image, le résultat reste, en fait, assez proche l'image d'origine dans sa construction et dans sa lumière. Un de mes objectifs est justement de pouvoir conserver ce lien photographique à la réalité, de ne pas créer des peintures digitales qui sortiraient uniquement de mon imaginaire , mais de transcrire la réalité observée au travers d'images qui semblent irréelles alors qu'elles ne font que sublimer l'instant vécu.
Pourquoi les grands formats ?
On pourra dire simplement parce que j'aime faire les choses en grand ou encore parce que c'est à la mode. Mais la raison est que j'aime être plongé dans l'image.
Je trouve qu'il est important de laisser à l’œil cette liberté qu'il possède dans le monde réel, de vagabonder d'un détail à l'autre, laissant le soin au cerveau de refabriquer l'image de ce qui l'entoure. Et donc pour pouvoir se plonger dans l'image, il faut non seulement qu'elle soit grande mais aussi que l'on puisse s'en approcher de près. Et Comme dans la peinture c'est tout l’intérêt de la double échelle de lecture, de loin et jusqu'en dans le détail, que j'ai choisie de proposer au travers de mes travaux.
De l'importance du détail
L'image originale captée par un appareil photo, est transformée pour en faire une toile unique, ou les détails de la réalité ont été réinterprétés, texturés ou lissés pour lui donner une matière originale.
On est dans l'univers figuratif de la photographie à l'échelle de l'œuvre et dans l'abstraction créative à l'échelle du détail. Ces détails ont des origines et des rôles multiples. Ils sont issus de mon attrait pour les matières et les couleurs que j'exprimais déjà à une autre échelle dans une de mes premières expositions nommée « matières sensibles ». Leur rôle est ici de permettre au tirage grand format de conserver un intérêt et une qualité visuelle y compris vu de très près. Il sont l'occasion pour le regard de « s'accrocher » comme il le ferait dans le monde réel une fois plongé au cœur de l'image.
Pourquoi un seul exemplaire ?
L'acte photographique est unique, fugitif et par définition impossible à reproduire à l'identique. Chaque œuvre est l'image de cet instant qui a présidé à sa naissance.
Il me semblait donc tout à fait approprié de rendre chaque « Estampe Photographique » unique. C'est un moyen d'affirmer encore plus sa distance au monde numérique ou tout se reproduit dans le « cloud » à l'infini et sur les écrans de chacun à l'infini.
Elle sont comme des enfants, que j'ai fait grandir et murir dans ma tête, depuis le moment de la photo initiale jusqu'au tirage final, parfois éloignés entre eux de plusieurs années. Bien que techniquement, rien ne m’empêcherait de faire des séries de chacune d'entre elles, cela me semble complètement antinomique à la valeur que j’y accorde. Lorsque quelqu'un décide d'en acquérir une, je dois accepter de m'en séparer définitivement comme un peintre de sa toile. Seule subsiste la photo originale puisque je détruit alors tous les intermédiaires numériques qui ont servi à l'élaboration de l'Estampe elle même.
Pourquoi elles sont uniques ?
Le travail nécessaire pour passer de la photo originale à une de mes « Estampes Photographiques », bien qu'il soit numérique, n'est pas automatique, il n'est pas le résultat d'un seul « filtre » ou même d'une succession identique d'étapes.
C'est un vrai processus créatif itératif qui nécessite plusieurs heures de travail. Il n'y a pas de « process » défini à l'avance qui serait automatisable. J'ai développé une palette « d'outils » que j'utilise individuellement au cours de l'élaboration de l'image. C'est donc un processus qui évolue en même temps que l'image se crée et je n'ai pas de règles définies à l'avance pour créer chaque image. Il y a une improvisation à chaque étape pour interpréter au mieux le ressenti que j'ai de l'image au moment où je la fabrique.
Le résultat final est donc complètement indéterminé au commencement et dépend aussi de l'état d'esprit dans lequel je me trouvais au moment ou je l'ai entrepris. Il m'est donc complètement impossible de faire deux fois la même chose à partir de la même photo.
Et même si certaines photos ont pu m'inspirer plusieurs fois, comme un peintre qui peindrait plusieurs fois un même paysage, le résultat est à chaque fois très différent même s'il conserve fondamentalement mon empreinte.